Ces femmes écrivains qui ont fait évoluer la littérature et la société (4) Les femmes et la poésie

Pour faire la transition avec l’article précédent, il y a ce constat : les femmes poètes pionnières ont commencé à entrer en poésie par l’érotisme. 

Qu’apportent les femmes de différent dans la poésie contemporaine ? La réponse d’une spécialiste est la suivante : originalité, sensibilité, les poétesses ne sont pas dans l’imitation de poètes au-dessus d’eux, elles sont dans leur propre écriture.

Pour les lectrices et lecteurs, franchir le seuil de l’espace poétique, c’est changer de relation au temps, s’affranchir des contraintes et limitations mentales habituelles, délaisser la productivité et  les dates limites à respecter. Il s’agit parfois même de se perdre sur des sentiers à peine balisés, de s’envoler dans le ciel avec l’oiseau-poésie ou encore de se relier à une dimension vaste comme l’infini.

Les vacances sont donc une période propice pour repousser l’horizon restreint du quotidien et élargir son espace intérieur par la lecture de poésies.

Je vous propose la lecture de quatre poèmes évoquant l’été -ou davantage si affinités-, accompagnés de quelques informations au sujet de leurs autrices. Le premier poème peut déconcerter non pas par son abstraction (ce qui est souvent le cas dans la poésie contemporaine), mais parce qu'il est écrit en vieux français.

Pour le retour du Soleil honorer

Pour le retour du Soleil honorer,

Le Zéphyr l'air serein lui appareille,

Et du sommeil l'eau et la terre éveille,

Qui les gardait, l'une de murmurer


En doux coulant, l'autre de se parer

De mainte fleur de couleur nonpareille.

Là les oiseaux des arbres font merveille,

Et aux passants font l'ennui modérer ;


Les nymphes là en mille jeux s'ébattent

Au clair de lune, et dansant l'herbe abattent.

Veux-tu, Zéphyr, de ton heur me donner,


Et que par toi toute me renouvelle ?

Fais mon Soleil devers moi retourner,

Et tu verras s'il ne me rend plus belle.


Louise Labé (1522-1566)

L’œuvre de Louise Labé est souvent envisagée comme un modèle d'écriture proto-féministe, en ce qu'elle incite ses contemporaines à faire valoir leur droit à être reconnues. Dans ses écrits, elle se concentre sur l'expérience féminine de l'amour, et réhabilite des figures de femmes émancipées.

Son œuvre (662 vers), se compose d'un Débat de Folie et d'Amour en cinq dialogues en prose, trois Élégies en décasyllabes, et vingt-quatre sonnets également en décasyllabes, portant sur l'amour éprouvé par les femmes, et les tourments qu'il peut entraîner. (Extrait de Wikipédia).

Lire d’autres poésies de Louise Labé

https://www.poetica.fr/categories/louise-labe/

Les lys blancs

Alors qu'un homme et une femme plantent

un jardin entre eux comme

lit d'étoiles, ils sont là

à s'attarder un soir d'été

et le soir se

refroidit de leur terreur : tout ça

pourrait prendre fin, il est capable

de tout dévaster. Tout, tout

peut disparaître, à travers l'air embaumé

les colonnes étroites

s'élèvent inutiles, et au-delà,

une mer déchaînée de coquelicots -


Chut, mon amour. Peu m'importe

le nombre d'étés qu'il me faut vivre pour revenir :

cet été, nous sommes entrés dans l'éternité.

J'ai senti tes deux mains

m'enterrer pour libérer sa splendeur.


Extrait du recueil L'Iris sauvage

Louise Glück (1943-2023) est une poétesse américaine. Primée à plusieurs reprises, elle est lauréate du prix Nobel de littérature en 2020.

Lire d'autres poèmes :

https://dailygeekshow.com/louise-gluck-prix-nobel-poeme/


Vacances

Tiède est le vent

Chaud est le temps

Fraîche est ta peau

Doux, le moment


Blanc est le pain

Bleu est le ciel

Rouge est le vin

D’or est le miel


Odeurs de mer

Embruns, senteurs

Parfums de terre

D’algues, de fleurs


Gai est ton rire

Plaisant ton teint

Bons, les chemins

Pour nous conduire


Lumière sans voile

Jours à chanter

Millions d’étoiles

Nuits à danser


Légers, nos dires

Claires, nos voix

Lourd, le désir

Pesants, nos bras


Tiède est le vent

Chaud est le temps

Fraîche est ta peau

Doux, le moment


Doux le moment…

Doux le moment…

                  

Extrait du recueil Ballades et réflexions à ma façon

Esther Granek (1927-2016)est une poétesse belgo-israélienne francophone, survivante de la Shoah. Elle a travaillé à l’ambassade de Belgique à Tel Aviv, comme secrétaire-comptable pendant 35 ans. 

Auteure-compositrice de chansons, poèmes, ballades, textes d’humeur et d’humour, elle publie plusieurs recueils. Ses vers se moquent des modes et des conventions. Ils séduisent tout de suite pour leur fantaisie et liberté. Avec une grâce très personnelle elle explore les thèmes de la nostalgie de l’enfance, du bonheur passé, des saisons inoubliées, de rêveries, des moralités et de l’amour. (Extrait du site Poética)

Lire d’autres poésies d’Esther Granek, simples et faciles d’accès

https://www.poetica.fr/categories/esther-granek/


La poésie et la chanson sont aussi proches que des sœurs, elles ont comme points communs la musicalité, le rythme (sauf quand la poésie ne se fonde que sur les images).


Ce merveilleux été

https://www.youtube.com/watch?v=aJq5YOg8v1U

Paroles de la chanson :

Déjà fini, le merveilleux été

Déjà fini, déjà cassé

Et le soleil qui nous allait si bien

Déjà prend d'autres chemins

Déjà la pluie qui me ressemble trop

Déjà le vent traîne de l'eau

Déjà je prends mon air des matins gris

Adieu la fille qui rit

Et la brume, la brume

Sur nos amours

Lentement désallume

Les jours

Il m'a donné, ce merveilleux été

Une douceur, une clarté

Une tendresse dans le creux des mains

Qui se réveille au matin

Je me sentais comme ces filles d'or

Qui au soleil brillent si fort

Mais je suis sombre et les nuages bas

Ne m'abandonneront pas

Et la brume, la brume

Sur nos amours

Lentement désallume

Les jours

Il reviendra, le merveilleux été

Il reviendra, tu l'as juré

Et le soleil nous vêtira de feu

Et nous serons lumineux

Chasse la pluie qui me ressemble tant

Chasse la pluie, chasse le vent

Regarde-moi, je veux briller encore

Être ta fille d'or

Mais la brume, la brume

Sur nos amours

Lentement désallume

Les jours

Car la brume, la brume

Cache toujours

Les soleils qui allument

L'amour.


Anne Sylvestre (1934-2020)

Auteure-compositrice-interprète française. Très populaire dans les années 1960 et 1970, elle se produit à la télévision auprès d'artistes prestigieux de la chanson comme Georges Brassens, Barbara, Georges Moustaki, Boby Lapointe.

Son premier disque, un 17 cm, sort en 1959 et le morceau Mon mari est parti est remarqué. Anne Sylvestre enchaîne alors les disques. On la compare parfois à Georges Brassens en raison de la qualité remarquable de ses textes et parce qu'elle s'accompagne, comme lui, à la guitare. Elle reçoit le prix de l’Académie de la chanson française en 1960. 


Je vous souhaite un bel été agrémenté de Poésie.


Sur le site Épanouissance vous pouvez vous procurer : les Petits Poèmes Glamour à partager

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Ces femmes écrivains qui ont fait évoluer la littérature et la société (3) Les femmes et la littérature érotique